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Christian Clot

On ne résoudra pas les questions liées au climat sans interroger le temps

On ne résoudra pas les questions liées au climat, à l’environnement et à la santé humaine sans se poser des questions sur le temps.

Les rapports se succèdent et leurs conclusions laissent peu de place au doute : sans un changement de paradigme réel, l’avenir sera soumis à un climat bien plus violent et chaud que prévu (voir le nouveau rapport de Earth System Dynamics), la santé mentale des populations va se dégrader fortement (écoanxiété, solastalgie) et l’accès aux ressources sera grandement réduit, augmentant le fossé entre population aisée et pauvre. Parmi les nombreuses questions qui se posent et les solutions proposées, l’une d’elles ne me paraît pas assez mise en avant, la question du temps. Le temps immédiat et le temps long. Aujourd'hui, je m'intéresse au temps immédiat :



La règle est absolue : il est impossible d’accélérer sans une dépense énergétique supérieure, qu’elle soit physique (électricité, pétrole …) ou mentale. Pour passer de 90km/h à 100 km/h, vous avez besoin d’énergie, et de plus d’énergie pour se maintenir à 100 qu’à 90. C’est vrai pour tout, y compris vouloir résoudre plus rapidement un calcul mental.

Pourtant, à l’heure actuelle, nous ne cessons de vouloir encore accélérer. Les livraisons sont passées de 24h à 2h et aujourd’hui à 10 minutes. 10 minutes ! Nous recevons chaque minute de nos vies des injonctions extérieures de la publicité, des notifications, des demandes, au point de saturer totalement nos aptitudes cognitives. Nous ne supportons plus, et c’est sans doute là le plus grand paradoxe d’une jeunesse pourtant férue d’écologie, d’attendre pour quoi que ce soit, comme Tik Tok l’a bien compris puisque ce réseau le plus énergivore du monde (plus que Facebook, Instagram, Twitter, LinkedIn et Whatsapp réuni) qui a fait du principe de papillonnement sont socle fondateur.

Pourtant, le constat est sans appel. L’épuisement est réel à la fois des ressources autant que de nos capacités mentales. Nos cerveaux s’épuisent, perdent leurs facultés de discernement par sursaturation et cherche donc à aller au plus simple… et donc au plus vite puisque directement accessibles. Un cercle vicieux totalement inhibant à l’heure de prendre des décisions importantes qui doivent considérer de grands ensembles plus que des particularités isolées.

Pourtant, nos cerveaux ont un véritable besoin de repos, de recul et surtout d’être moins soumis à de constantes injonctions temporelles.

C’est l’un des résultats les plus intéressants que nous avons pu analyser de notre expérience DEEP TIME, 40 jours dans une grotte sans aucun accès à une information temporelle. Cette absence de notion temporelle, qui m’inquiétait pour les risques qu’elle pouvait représenter sur la santé mentale, c’est au contraire révélée comme une forme de soulagement. Après quelques jours de découverte, puis une période d’incompréhension cognitive qui se traduit par une forme d’apathie, une difficulté à comprendre les nouvelles conditions de vie, c’est l’apaisement qui a pris le pas avec à la fois un sentiment de liberté (notion énoncée par 86,6% des sujets) et de maîtrise personnelle (pour 80%).

Alors bien sûr, le sujet n’est pas de mettre toute la population dans une grotte. Mais parmi les adaptations et évolutions comportementales indispensables pour donner une chance à notre futur, une remise à plat du besoin de vitesse et d’accélération du temps est fondamentale.

Parce que, franchement… Des livraisons en 10 min !!!


A lire : "Deep Time, 40 jours sous terre" de Christian Clot (Robert Laffont 2021)



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